Le nez dans ta fourrure, les doigts sur ton corps tout chaud, le bras soutenant le poids de ta minuscule tête, comment écrire ? Sept mois que chacune de tes respirations est un miracle. Je suis pendue à ton souffle, nuit après nuit. Angoisse et émerveillement se succèdent et se mêlent. Combien de temps encore ? Mes doigts rouillent de ne plus taper sur le clavier. Et si je perdais les mots ? Le cerveau boucle et chauffe jusqu’à se mettre en pause. Quelle heure le prochain comprimé ? Ta douleur est-elle supportable ou as-tu besoin de mon aide ? Vas-tu vouloir manger aujourd’hui ? Si non, où trouver de la nourriture qui voudra bien passer ? Comment récupérer les anti-douleurs, les anti-vomitifs, les anti-inflammatoires qui me manquent avant le week-end ? Opération ou pas ? À quand la prochaine prise de sang ? Pourquoi tu manges ta litière ? Selles normales aujourd’hui ? C’est quoi ce bruit de cafetière quand tu respires ? Et quand tu sors ta mignonne petite langue, signe de détente ou d’inconfort ? Tes somnolences sans sommeil, effets secondaires du traitement ou maladie qui s’aggrave ? Quand est-ce qu’on arrête ? Est-ce que tu vas guérir ? Je replonge le nez dans ton cou, tu cales ton museau sous mon menton, mes bras t’entourent sans t’écraser, cocon de chair, de chaleur et d’amour. Je te rassure et tu t’apaises. Ne pas bouger, surtout ne pas bouger. L’angoisse reflue et reste tapie cachée dans le sternum. Mes larmes rejoignent mes sourires. Tu vis tout contre moi et c’est merveilleux. Je n’aurai jamais assez de toi, ne serai jamais jamais jamais prête à te voir partir. Aujourd’hui tu es là, je passe des heures à te respirer, te servir d’oreiller, de forteresse, de radiateur. À quoi bon écrire?