Pour avoir le début de l’histoire, c’est par ici.
Joe s’enfuit la queue entre les pattes, crachant son dépit et feulant de frustration. Passant habilement entre les vélos, scooters et voitures de la rue, il se rendit d’une traite au lycée. Là, il s’assit au coin fumeur jusqu’à la récréation, impatient de tester son tout nouveau charme sur ses camarades de classe, bien certain que Lola ne ratait jamais la pause clope.
Quand le troupeau de lycéens débarqua, traînant les pieds, haussant la voix, Joe lança quelques miaulements qu’il voulait irrésistiblement rauques. Les rires cessèrent, les regards se tournèrent vers lui, les yeux s’ébahirent, les nez se froncèrent. Puis les rires reprirent, assortis de petits noms affectueux, tels qu’avorton, paillasson, boule puante ou rat-taupe nu (lancé par un seconde qui sortait d’un cours sur la biodiversité en SVT). Lola tenta de prendre sa défense, l’attrapant contre elle par esprit de bravade, mais elle renonça quand Joe miaula de plus belle pour lui signifier son amour. Elle se boucha vivement les oreilles, laissant Joe à la merci de la cruauté de ses semblables. Quand les pierres, les crachats et les mégots allumés volèrent vers lui, Joe fila sans demander son reste, zigzagant éperdument, la panique chevillée au corps.
Il s’engouffra dans un regard d’égout, glissa sur deux mètres dans une eau boueuse et se hissa tant bien que mal sur un rebord qui ferait office de zone sèche, bien à l’abri des humains.