Pour avoir le début de l’histoire, c’est ici.
Sitôt le canard hors circuit, le jeune Pierre-Henri fut libéré, délivré de l’emprise de la Tigrée. Il retrouva immédiatement la capacité à sentir les émotions des autres, et vint spontanément à l’aide de Joe. Celui-ci était épuisé, et un poil secoué d’avoir dû assommer l’enveloppe corporelle de son ami, même s’il savait très bien que c’était la seule chose à faire. Il se lova dans les bras du jeune homme, frottant son menton dans les longues dreadlocks qui lui pendaient sur les épaules. La lumière vibrait plus fort contre lui mais ne sortait pas de son bandana, il n’était pas question pour l’instant de retrouver un ancien corps, appartenant à son passé.
Après avoir fait le plein de grattouilles, Joe se remit au travail. Il laissa le jeune Pierre-Henri déplacer en douceur le corps du canard pour l’éloigner et le ligoter à une colonne de saphir sans le blesser davantage. Joe vint mobiliser le Pierre-Henri d’âge moyen, qui avait l’air vraiment souffrant.
En sondant son esprit, il vit la détermination de l’homme, pourtant immense, s’enfoncer dans un épais brouillard de peur. Une peur diffuse, nébuleuse, s’infiltrait malgré tous les efforts de Pierre-Henri pour la tenir à distance et sapait finalement sa motivation, miette après miette. Une peur sans objet tangible, impossible à combattre de front, et qui affectait, in fine, toutes les fonctions vitales de l’homme.
Joe, de toute l’inconscience de sa jeunesse, de son inexpérience et de son arrogance féline, fonça dans cette brume sans plus attendre.