Révolution de chiffons

“Je n’en peux plus de travailler comme ça pour finir par tournoyer dans l’eau jusqu’à la noyade !” C’est en ces termes que Chiff’, le chiffon à poussière se fit l’instigateur de la Révolution des Chiffons. Pour des conditions de travail décentes (un travail régulier et léger plutôt que des périodes sans fin d’inactivité suivant une charge de travail frisant l’esclavagisme), une reconnaissance de sa condition et un respect de son travail, il porta ses revendications devant le maître de la maison. Il cria qu’il en avait marre de vivre dans une porcherie et d’être le seul à toujours se salir. Il fut rapidement suivi par la serpillère, la brosse à dents et le balai-brosse des toilettes. Ensemble, ils firent front pour une meilleure répartition des tâches, un remplacement des effectifs dès les premiers signes de fatigue chronique, un aménagement du travail en cas de blessures graves, et le droit à des soins adaptés.

Le maître les écouta. Ils crurent avoir gain de cause. Ce n’était pour eux que le début d’un long chômage technique et d’une placardisation, le maître ayant fait remonter leurs revendications à ses associés. Il en a par ailleurs profité pour négocier un allègement significatif des tâches ménagères en leur nom, ce qui était particulièrement bienvenu pour lui. Ainsi la Révolution des Chiffons fut-elle récupérée pour le compte du maître. Leurs revendications ayant été détournées, on considéra qu’ils n’avaient plus de raisons de se plaindre et tout le monde les oublia.

Le bûcheron et la fée

Michel reposa la lourde hache à terre, se pencha en avant pour étirer son dos douloureux. Il s’assit sur un tronc pour une pause bienvenue avant de se remettre au travail. Et se rendit compte qu’il avait oublié sa glacière. Il jura tout bas et, en posant sa main sur la mousse du tronc, souhaita ardemment avoir une bière bien fraîche. Alors tout naturellement, une petite femme, très court vêtue, lui apporta une Leffe sur un plateau.

Le bûcheron épuisé prit la bière et la sirota. Puis il regarda, ahuri, autour de lui. Nulle trace de la petite serveuse. Il jeta un coup d’œil à sa bière, vide, et secoua la tête avant de reprendre le travail. Un jour, il faudrait vraiment qu’il arrête de travailler seul, ce n’est pas bon du tout pour le mental…

Trois troncs plus tard, Michel s’arrêta une nouvelle fois. Non seulement il avait soif, mais son dos commençait sérieusement à le lancer. Il regarda tout autour de lui, certain d’être seul, et se soulagea dans un fourré. Lorsqu’il regagna son poste de travail, une bière et une masseuse (très petite et très court vêtue) l’attendaient. Ni une ni deux, il s’allongea et se laissa masser. Puis il souhaita de tout son cœur avoir déjà fini sa journée de travail pour mieux en profiter, et que le bois coupé soit déjà rentré dans son abri. Lorsque le massage fut fini, il prit sa bière et regarda la petite masseuse. Elle fit un clin d’œil et la nuit tomba. Le bûcheron, paniqué à l’idée d’être autant en retard, se leva pour ranger le bois. Qui l’attendait, sagement empilé, sous son abri. Complètement abasourdi, il demanda à la masseuse si elle savait ce qui s’était passé. Elle le regardait, un sourire coquin aux lèvres. Bien sûr qu’elle savait. Elle venait de réaliser ses trois vœux. Il lui demanda pourquoi elle ne l’avait pas prévenu avant, peut être aurait-il voulu autre chose… Elle lui répondit, magnanime, qu’il lui restait un vœu, et qu’elle avait la nuit devant elle.

Orchestre

Aujourd’hui c’est un bon jour pour réaliser son rêve. Terrassant sa timidité, il s’apprête à mener pour la première fois “son” orchestre. Dans la fosse devant la mare, les mâles sont répartis. La capacité de leurs sacs pulmonaire a été évaluée trois jours plus tôt. Ils sont prêts à jouer le chant de leur parade, les femelles étant installées tout autour de leur fosse. Le chef d’orchestre a réussi à réunir des pic-verts pour assurer les percussions et leur offrir un contre-point flatteur. Si ce soir, le grand soir qui marque l’entrée dans la saison des amours, son orchestre se distingue de celui de l’étang voisin, alors c’est sûr qu’il aura gagné estime et respect de la part des demoiselles qui vont l’écouter. Sa descendance pourra profiter de l’occasion pour se reproduire encore et encore, concurrencer les points d’eau des environs, et, pourquoi pas, gagner la suprématie sur la commune, le département, la région. Il se voit déjà, avec ses armées de descendants, en train de conquérir le monde. Décidément, Cortex avait tout faux. Il suffit de faire chanter les mâles de sa famille. Et pour ça, il se tient prêt. C’est parti !

Beaucoup de bruit pour rien

Cela fait des mois qu’il en entend parler et sa déception est à la hauteur des espérances qu’il avait. Pourquoi lui promettre tant et tant si au final il se retrouve aussi quelconque qu’avant? Il se serait contenté de la situation si personne ne lui avait dit à quel point la vie serait merveilleuse après LE changement.

Or LE changement est arrivé voici trois mois, et rien, pas une fille qui se retourne sur son passage, toujours les mêmes refus, il ne se sent pas plus grand ni plus fort ni plus viril qu’avant. La vie est toujours désespérément la même. Même ses amis masculins n’ont rien remarqué et continuent de le traiter affectueusement de petit. Sa mère lui fait encore de gros câlins quand il rentre de l’école, même s’il sait bien, lui, que ce n’est plus du tout de son âge… Son père ne lui a encore pas proposé de moments privilégiés “entre hommes”, maintenant qu’il en est un.

Non, décidément, cette histoire de premier poil, ce n’est vraiment qu’une arnaque…

Ma prise en main

Regardez-moi, vous n’imaginez pas à quel point je peux vous convenir. Touchez-moi, je suis la douceur incarnée. Prenez-moi, je suis parfaitement ergonomique. Je me tiens bien droit comme un “i” mais surtout pas rigide, je reste très maniable. Juste ce qu’il faut d’adhésion, juste ce qu’il faut de glissements, je suis conçu pour une prise en main parfaite. Avec moi, vous aurez la sensation immédiate que vous savez y faire, que vous vous en sortez comme un chef. Vous aurez toutes les raisons du monde d’arborer cet air fier. Vous maîtrisez le geste et les effets en sont visibles rapidement. Avec moi, c’est la réussite assurée, spécialement pour les novices. Laissez-vous tenter, je vous assure que vous ne le regretterez pas.