Qui ne dit mot consent ?

Elle n’a pas dit non, perdue dans ses limbes éthyliques.

Elle n’a pas dit non, mais son mari voulait.

Elle n’a pas dit non, son QI ne lui permettrait pas.

Elle n’a pas dit non, elle avait peur que ça n’empire.

Elle n’a pas dit non, c’est une petite fille bien élevée.

Elle n’a pas dit non, sa carrière serait foutue.

Elle n’a pas dit non, mais elle n’a rien senti dans son corps paralysé.

Elle n’a pas dit non, bien trop surprise pour ça.

Elle n’a pas dit non, confiante devant les amis de “son homme”.

Elle n’a pas dit non, sous les yeux de sa fille apeurée.

Elle n’a pas dit non, elle n’a pas de papiers.

Elle n’a pas dit non, elle l’avait bien cherché.

Elle n’a pas dit non, que penseraient ses parents d’une allumeuse comme elle ?

Elle n’a pas dit non, ça n’aurait rien changé de toutes façons.

C’est sûr, elle n’a pas dit non.

Mais elle n’a pas dit oui non plus. Ou alors par devoir. Ou bien sans s’en rendre compte. Ou sans savoir à quoi. Enfin, elle voulait pas. Elle pouvait pas vouloir.

Vous avez dit clichés ?

En mini-jupe dans ce quartier, faudra pas venir pleurer. Voile intégral pour se cacher, laïcité menacée. Du poil au pattes sur la croisette, pourrait faire attention à elle, quand même. Costard-cravate, c’est qui pisse debout ? Avec ce décolleté, à coup sûr l’entretien s’est bien passé. Mascara et talons-aiguille, ça valait le coup de vous libérer… Survet-baskets, garçon-manqué, aucune féminité. Le minou buissonnant, pas très appétissant. Fitness et régime Dunkan, complexes ridicules et préoccupations futiles. Tétons qui pointent libres sous le T-shirt, c’est fait exprès, quelle allumeuse. Jupe-tailleur et escarpins, sûrement frigide et formatée. Poignées d’amour et vergetures, elle a pas honte, ça déborde de partout.

Puisqu’on vous dit qu’on n’a jamais autant respecté la nature des femmes…

Non, c’est non

J’ai le droit de dire non, à moitié nue dans le lit d’un homme, parce que malgré l’alcool abrutissant, je me rends compte que je ne veux pas.

J’ai le droit de dire non, à moitié nue dans le lit d’un homme, parce qu’à la suite d’un mot, d’un regard où d’un geste, je n’ai plus confiance, je suis mal à l’aise.

J’ai le droit de dire non, à moitié nue dans le lit d’un homme, parce que j’ai changé d’avis, je n’ai plus envie. Même si j’ai déboutonné moi-même mon jean et dégrafé mon soutien-gorge.

J’ai le droit de dire non, à moitié nue dans le lit d’un homme, parce que finalement j’aime trop mon “officiel” et qu’il n’est jamais trop tard pour s’en rendre compte.

J’ai le droit de dire non, à moitié nue dans le lit de l’homme chez qui j’ai ramené une amie pour qu’on s’amuse à trois.

J’ai le droit dire non, à moitié nue dans les toilettes de la boîte où j’ai suivi les deux costauds qui me plaisaient pourtant il y a dix minutes.

J’ai le droit de dire non, à moitié nue dans le lit d’un client, parce que là, vraiment, c’est au-dessus de mes forces ; de lui rendre son argent et de me rhabiller.

J’ai le droit de dire non, à moitié nue dans le lit conjugal, même si c’est mon septième refus cette semaine.

J’ai le droit de dire non, complètement nue dans le lit d’un homme, les cuisses ouvertes ou à quatre pattes, parce que je n’aime pas vraiment ce qu’il me propose maintenant.

Et quand je dis non, c’est non. Même si, pour quelque raison que ce soit, je ne hurle pas. Même si je ne tape pas, ne mords pas, ne griffe pas ou n’émascule pas. Tout le monde n’y pense pas forcément au moment opportun.

Est-ce que je l’oblige, moi, quand il me dit non, à coucher quand même sous prétexte que s’il bande, c’est bien qu’il en meurt d’envie ? C’est pourtant connu, les hommes, ils ne veulent jamais vraiment dire non, ils aiment bien se faire désirer, c’est tout…

Le bout du toit

Est-ce qu’ils vivent tellement plus fort que les autres, qu’un creux de la vague leur paraît insurmontable, ces gens qui, arrivés au bout du toit, font quelques pas de plus ? Ou au contraire sont-ils à la recherche d’une ultime décharge d’adrénaline dans le brouillard de leurs existences ? Se sont-ils pris un train de vie en pleine face au lieu de le laisser glisser sur leurs remparts ? N’ont-ils plus la moindre lueur d’espoir qui les convainque que si demain n’est pas mieux qu’aujourd’hui, dans dix ans, peut être, ça va aller ? N’ont-ils plus aucune ressource pour rajouter quelques rayons de soleil à leur existence, plus aucune volonté de changer ce qui peut encore l’être ? Croient-ils vraiment qu’ils peuvent voler ? Sont-ils si fatigués qu’ils n’aient plus envie de se réveiller ? Croient-ils tant que ça en la physique et si peu en eux pour lui confier aussi aveuglément leur avenir ? Est-ce que pour eux le manque de raison de vivre devient une raison de mourir ? Est-ce qu’au fond, ça a tant d’importance, qu’ils prennent un peu d’avance sur l’échéance, alors que nous faisons tout pour allonger les délais ?

Monsieur Météo

Quand le temps est au beau fixe, les plus chanceux, les moins plaintifs, savent profiter, s’incoucient et projettent à tout va leur bonne humeur et leurs espoirs.

Par avis de tempête, les volontaires se révèlent, les errants s’occupent enfin, les électrons libres entrent de concert dans la mouvance. Le sentiment d’utilité cimente le tout et les fourmis se rêvent Titans.

Le temps maussade, quant à lui, érode les certitudes et ennuie les imaginaires. La grise mine persistante de quelques cieux vaut-elle vraiment les cernes qu’on arbore uniformément ? Est-il nécessaire de sortir l’artillerie lourde face à ce tout petit crachin ? Plutôt patienter de mauvais gré en attendant que ça passe. La passivité, alors, mine le corps et l’esprit, berne le moral et use les volontés.