Dans ma vie en noir et gris, je suis allée chercher chaleur et lumière pour me recolorer. Patiemment, j’ai retrouvé et recréé une à une les couleurs de ma vie. Je teste mes propres mélanges, je choisis et invente de nouveaux assortiments en quête d’harmonie.
Toute absorbée, enveloppée par ces couleurs qui me reviennent au compte-goutte, je n’avais pas remarqué la soie qui bouchait mes oreilles. Les fils de ma chrysalide, tissée serrée autour de mon être pour me protéger, le temps que ma chair à vif cicatrise. Je savais bien que je ne dansais plus, mais je n’avais pas noté l’immense sourdine autour de mon cœur, l’empêchant de chanter, fredonner la moindre mélodie.
Et pourtant, à mon insu, telle une baleine solitaire, j’ai envoyé de puissantes notes à travers le temps et l’espace. Jusqu’à trouver un écho. Jusqu’à entendre une vibration, une résonance, finalement. Fraîchement sortie de mon cocon, j’ai voleté jusqu’à sa source. Ballotée, secouée, remuée par des ondes trop intenses, de trop hautes fréquences, j’ai vaillamment gardé le cap.
Et voici que j’entends à nouveau la musique du monde. Et voici que je chante à nouveau. Et voici que je danse à nouveau. Je lance des lignes de basse dans l’univers. Et je reçois d’exquis accords en retour.
Les phrases mélodiques s’enchaînent et se répondent. Chacune son rythme, chacune son harmonie. Chaque phrase se suffit à elle-même. Mais combinées entre elles, elles dessinent un ensemble unique. Les silences qui s’intercalent permettent à la musique de se développer, puissante, envoûtante. Ils sont respiration, ils sont musique aussi. Musique qui jaillit de moi et libère enfin toutes les musiques en attente dans mon âme.
Et me voilà, plongée, immergée totalement dans un monde de couleurs mélodieuses et de sons chatoyants. Entière.