Ma vie. Éparpillée à mes pieds comme une céramique explosée au sol. Un oiseau de porcelaine. Éclaté en plein vol.
Des bouts de vie, tranchants, mêlés à la terre dans un ensemble incohérent, aux couleurs vives et parfois mal assorties.
De doux souvenirs aiguisés comme des rasoirs. Des routines rutilantes. Des projets devenus puzzles. De la poussière d’amour, partout ; minuscules esquilles qui volent au vent et s’infiltrent dans le moindre interstice. D’infimes regrets, petites billes de verre, polis d’avoir été tournés et retournés en tous sens.
Lentement, l’un après l’autre, il me faut ramasser ces éclats de vie. Les réassembler en un tableau plus grand que l’original. Les apparier avec soin. Les lier un à un dans un mortier de rires et de larmes. Trouver une harmonie qui m’échappe totalement quand je ne vois qu’un gâchis insensé, les restes d’un immense bonheur fracassé si violemment.
N’en oublier aucun. Surtout ne rien oublier. Porter les souvenirs de nos deux vies entremêlées dans mon seul cœur. Qui déborde jour après jour, larme après larme, de trop d’amour, de trop de vide, de trop de vie.
Espérer, peut-être. Qu’après des mois, des années de ce travail fastidieux, tortueux, il en sorte une mosaïque. Modeste ou grandiose. Complète, enfin.