Un éclair roux traverse en trombe le salon. Tombe la pile de CD en équilibre sur la table basse. L’éclair roux ne s’arrête pas. Le voilà qui saute sur le chat qui dormait par là. Grondements, feulements, griffes acérées, l’éclair repart illico presto. Profitant d’un battement d’environ dix secondes pendant lesquelles personne ne le regarde, il subtilise la part de brioche qui attendait sur la table l’heure du goûter. Dès qu’il sent un regard sur lui, l’éclair roux s’enfuit par la baie vitrée, tache orange zigzaguant sur l’étendue verte. Dans ce val improvisé, c’est lui le roi, la terreur de la faune. Dès que passe un enfant, un congénère ou un admirateur, le voilà qui parade avant de repartir, insaisissable. Mais lorsque, excédés par ses facéties, son espièglerie, sa manière de n’en faire qu’à sa tête nous décidons de le remettre en place une bonne fois pour toute, voilà que nous tombons sur une petite boule de poils ronronnante qui transpire la paix et son amour pour nous. Rangé le pistolet à eau que nous nous apprêtions à dégainer, nous profitons ensemble de cette seconde de calme et de fausse innocence.