Pour la seizième fois, le voilà qui revient. Comme tous les ans, je sors les mouchoirs, parée pour faire face à l’inondation saisonnière. Tandis que mes yeux me picotent et que mon nez coulant me gratte, une étrange sensation me surprend.
Ça part du ventre, tout au fond. Quelque chose de sourd et d’impérieux envahit mes entrailles. Me force à tourner la tête, scruter, passer chaque individu -apparié de près ou de loin à la gent masculine- au radar. Prend le contrôle de mon corps, le redresse, chatouille mes reins, relève mon regard, envoie des sourires à la ronde, me donne le cœur léger.
Prête à me jeter au cou des trois quarts des passants, je découvre avec délices et effroi les joies du fourmillement hormonal. Ainsi j’apprends que chaque printemps la nature reprend ses droits. Farceuse, elle rend attrayants à mes yeux de jeunes pré-pubères et des types d’au moins trente ans au regard déshabillant, qui ne m’inspiraient jusque là que mépris et condescendance. L’été promet d’être intéressant. Mais où ai-je donc rangé pilule et capotes ?