Le fil d’Ariane

Assise seule en pleine nuit en haut des escaliers, je compose des numéros de téléphone pour m’extraire du cauchemar dans lequel je bascule. À chaque sonnerie sans réponse, je chute un peu plus, comme une branche qui se déroberait sous ma main en quête d’appui.
À 5h du matin, la famille, les amis dorment et ce téléphone inutile me rappelle la vie de solitude qui m’attend désormais. Un gouffre qui me terrorise, même si je ne peux pas encore l’appréhender. 
Le répertoire défile, les tonalités s’enchaînent et je ne sais pas vers qui me tourner. Le médecin revient me dire qu’il me faut du soutien, que je ne peux rester seule. J’approuve mais je suis incapable de parler aux répondeurs qui ne savent pas, qui ne peuvent rien pour moi.

Je me rappelle que tu n’éteins jamais ton téléphone la nuit depuis le décès de ta grand-mère. Tu es presque la dernière personne que je pensais appeler. C’est un sale coup à te faire, t’appeler à la rescousse après t’avoir éloigné brutalement. 
Avant que la solitude ne m’engloutisse totalement, quand il n’y a de toute façon ni espoir ni sens à cette vie absurde, je compose ton numéro.
Quatre sonneries. Je veux raccrocher mais je résiste. J’ai besoin de toi. 
Tu décroches. Tu tends ta voix ensommeillée vers moi, et tu t’arqueboutes tout entier pour tenter de freiner ma chute.

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