L’uniforme vert

Je commence demain. L’uniforme est là, posé sur mon lit. Je l’essaie encore une fois, pour être sûr. Je n’arrive pas à croire que j’ai été sélectionné, malgré tout. Il me parait flambant neuf, j’ai tellement peur de l’abîmer. On m’a bien prévenu que je n’en aurais qu’un, que les réparations ou son remplacement seraient à ma charge.

Demain, grâce à mon uniforme vert, je pourrai me glisser dans la peau d’un autre, jouer un rôle. Montrer à tous que j’ai réussi. Là où on ne m’attendait pas, en fait. Je me souviens du fils des voisins qui se moquait de moi à l’époque. Lui serait pilote et moi éboueur. Mon uniforme est peut être vert, mais il n’est pas fluo. Mon béret, vert aussi, m’ouvre les portes d’une nouvelle famille. Une famille comme celle que je n’ai pas connu dans un pays qui n’a jamais été le mien. Celui où j’aurais dû rentrer, toujours selon ce morveux. J’aimerais bien maintenant, le rencontrer, comme ça, chacun dans notre uniforme. Et voir un éclair de peur passer dans ses yeux, juste avant qu’il ne comprenne que pour moi la question de camp n’est que subjective…

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