La colline du silence

La voix dans le casque me fait sursauter. Un mois sans l’avoir entendue, j’avais fini par l’oublier, me calmer. Mais entendre cette voix, à 16h43, en plein travail et sans y être préparé, j’en ai des picotements sur la nuque. Ainsi, il n’a pas lâché l’affaire.

Il attaque directement, comme si nous nous étions parlés hier. « L’important, avec les champignons, c’est de savoir ne pas les cueillir ». Après la surprise de l’entendre sans préavis, je commence à enrager. Au moment où ma réponse est enfin prête, je cherche un moyen de lui parler. Où est-il ? Je ne le trouve nulle part, son numéro n’est pas affiché sur mon écran, dans le micro je n’ai que mon nouveau client qui attend que je réponde à sa requête. Je tourne ma tête dans tous les sens, mais je sais bien qu’il n’est pas dans l’open-space. Je bredouille quelques mots sur mon incapacité temporaire à assurer le service technique, prétextant un problème de connexion et j’invite le client à rappeler dans une demi-heure. Je coupe mon casque et reprends mes esprits.

C’est tellement son genre de revenir m’agacer un quart d’heure avant la fin de mon service et de repartir aussi sec. Il sait que je vais penser à lui toute la soirée, attendre malgré moi son bon vouloir pour terminer notre conversation. Je n’ai plus aucun moyen de le contacter depuis sa disparition. Que j’aie raison ou tort ne change rien maintenant qu’il a le pouvoir de contrôler nos échanges. C’est lui qui décide qui peut parler et quand ; à la moindre contrariété il coupe le contact et je n’ai plus que le silence à qui hurler ma frustration. Après notre dernier affrontement, j’avais passé une semaine à guetter chaque jour toutes les adresses que je lui connaissais, tous les numéros avec lesquels il m’avait appelé, tous les sites sur lesquels il avait traîné. Je me relevais la nuit pour vérifier ma boîte mail ou mon téléphone, jeter un œil sous le paillasson ou rouvrir mes volets en espérant l’apercevoir. Je pensais avoir eu le dernier mot avec mon couplet sur nos balades avec le grand-père et j’avais pris son silence pour une victoire.

Je n’avais pas idée de la vengeance qu’il mitonnait.

À suivre…

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3 commentaires sur “La colline du silence

    • Je voulais tester. Je fais jamais ça, je voulais voir si ça marchait. Pis surtout, je devais partir en voyage, et je sais pas encore ce qui se passe après (même si j’ai ma petite idée de ce qui s’est passé avant) (même pour moi, c’est un cliffhanger). Ce texte est encore un exercice de déclencheur, je voulais voir ce qu’il en ressortait. Je continuerai avec le prochain déclencheur (normalement samedi ou lundi). Je reprends le blog comme lieu de tests, en attendant de complètement restructurer peaufiner mon manuscrit.

    • Pis à mon avis, c’est pas un cliffhanger de malade : tout le début du texte donne une bonne idée de cette vengeance. Mais en le relisant, je me rends compte que peut être vous en attendez plus. Tant pis. Comme je l’ai dit, c’était un test :)

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